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La rage : au moins 800 décès par an qui pourraient être évités

L'HEBDO
Publié le 23/10/2015. Article écrit par Pierre Gillette
 
 

 

Pasteur institute labPhoto : Fabien Mouret

Avec un chien pour trois habitants, le royaume est indubitablement l’un des champions du monde dans ce domaine. Selon une projection réalisée par l’Institut Pasteur de Phnom Penh à partir d’une étude menée dans une province, ces cinq millions de canidés, qu’ils soient chiens de garde ou de compagnie, mordent environ 700 000 personnes chaque année et, à l’exception de quelques animaux appartenant essentiellement à des étrangers, aucun de ceux-ci n’est vacciné contre la rage.

Impossible de déterminer la proportion de ceux porteurs de la rage mais, si les chiens mordeurs ne sont pas forcément contaminés, on sait que les chiens enragés ont tendance à mordre quand on les approche. Et, chaque année, l’Institut Pasteur reçoit aux alentours de 22 000 personnes ayant été mordues et qui, inquiètes, viennent y recevoir la Prophylaxie Post Exposition (PPE) et ainsi être soignées si elles ont été contaminées.

« Dans les pays en développement, la rage est essentiellement un problème lié au chien, souligne le Dr Arnaud Tarantola, directeur de l’unité d’épidémiologie et de santé publique à l’Institut. Une fois que la question du chien a été traitée, comme aux Etats-Unis ou en France,  alors la rage décline fortement pour finalement ne persister que dans la faune sauvage. »

15320573545 2b0c90b281 oPhoto : Fabien Mouret

La rage, une maladie négligée

Parce que c’est une maladie touchant plutôt des populations rurales et pauvres, parce qu’elle est souvent sous-estimée car cette une maladie à évolution rapide et souvent non diagnostiquée, la rage est négligée dans la politique de santé publique. « Pourtant, insiste le Dr Tarantola, c’est une maladie 100% évitable. Vaccinez tous les chiens et le problème de la rage est résolu. On peut aussi décider de rendre obligatoire la vaccination des humains mais ce n’est pas forcément la meilleure solution en terme de santé publique. C’est peut-être moins onéreux et moins risqué de vacciner tous les chiens»

La vaccination d’un chien doit être répétée tous les ans ou tous les deux ans pour un coût d’environ deux dollars pour la dose de vaccin (hors coût de vaccination, transport, stockage, etc.). « Compte tenu des autres priorités, on imagine mal un donateur débourser des millions de dollars pour la vaccination de ces animaux, remarque le Dr Tarantola. Il faudra peut-être que les gens paient de leur poche. Pour parvenir à mettre en place cette politique, il faudrait agir à de multiples niveaux car c’est une question de volonté politique et institutionnelle puisque cela demande de changer des lois, de mettre en place des obligations légales, de former des vétérinaires, de fixer un prix maximal du vaccin, etc. Il est aussi important d’informer et éduquer les gens. Peut-être faudrait-il pour cela créer un permis pour posséde un chien ou bien une médaille pour la vaccination de son animal ou encore faire en sorte que la responsabilité financière du propriétaire du chien soit engagée si son animal mord et transmet la rage. L’un des points positifs au Cambodge est que la quasi-totalité des chiens ont un propriétaire identifié. Cela facilite la mise en place de mesures de ce genre. »

En attendant l’éventuelle mise en chantier de cette politique de vaccination, la priorité de l’Institut Pasteur est de développer ses capacités à recevoir des patients pour y recevoir la PPE qui consiste en quatre sessions de deux injections du vaccin qui doivent commencer si possible le jour de la morsure J0 puis à J+3, J+7 et un rappel qui renforce la réponse immunitaire à J+28. Si le chien mordeur survit au-delà de 10 jours après la morsure, cela signifie qu’il n’était pas enragé. Alors la dernière session d’injections n’est pas utile et la personne peut se considérer protégée.

« Avec la base de données très importante dont nous disposons, l’une des plus grandes du monde, nous essayons de déterminer si le taux de survie chez les gens qui ne sont pas venus à la quatrième session pour des raisons de distance ou de disponibilité est aussi important, voire meilleur, que ceux qui ont eu les quatre. Si c’est le cas, ce serait une très bonne nouvelle car cela permettrait d’abaisser le coût du traitement par personne (prix subventionné pour les Cambodgiens de 10 USD pour les quatre sessions non compris l’injection immunoglobuline si la situation du patient l’exige) et donc d’en faire profiter davantage de gens. Cela permettrait aussi d’en réduire la durée et de diminuer les coûts de transports pour des populations rurales démunies », souligne le Dr Tarantola.

Pour améliorer ses services, l’Institut réfléchit également à la création de centres secondaires dans le pays de façon à ce que les gens puissent bénéficier de la même qualité de prestations qu’à Phnom Penh.

Il viendra sans doute un temps où la rage ne sera plus au Cambodge qu’un mauvais souvenir et où le risque de voir un de ses proches emporté dans de terribles souffrances aura totalement disparu. Pour cela, le chemin est déjà tracé.

A SAVOIR

• En cas de morsure, laver la plaie pendant 10-15 minutes puis la badigeonner de Bétadine. Administrer la PPE le plus rapidement possible. Il faut absolument que le patient soit sous traitement avant qu’apparaissent les premiers symptômes.

• Le risque de transmission du virus par la salive d’un chien enragé est d’autant plus élevé que la morsure est proche du cerveau. Les enfants, davantage susceptibles d’être mordus au visage que les adultes, sont donc particulièrement exposés.

•-En vaccinant votre animal de compagnie - chien ou chat car les chats doivent aussi être vaccinés -  vous vous protégez en le protégeant de la maladie et vous éliminez le risque qu’il contamine qui que ce soit.

 

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